Fortification alimentaire dans le Centre-Nord : Table de vérité dans les assiettes des élèves déplacés internes

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Le Rapport statistique mensuel de l’éducation en situation d’urgence (ESU) estime à 932 221, à la date du 31 mai 2024, le nombre d’Élèves déplacés internes (EDI) au Burkina Faso. Une équipe du Club des Journalistes et Communicateurs pour la Nutrition et la Sécurité Alimentaire (CJCN-SA), en collaboration avec l’Alliance Nationale pour la Fortification (ANF), a sillonné la région du Centre-Nord en mi-juillet 2024. Objectif : s’enquérir de l’état de la fortification alimentaire, plus particulièrement, au niveau des Élèves Déplacés Internes (EDI). Nous avons trempé notre plume dans les assiettes des élèves déplacés. Après constat, la fortification au sein de cette couche vulnérable de la zone est inscrite dans les priorités. Regard sur le processus dans la région ! 

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Nous sommes le 14 juillet 2024 à Kaya. Sous un ciel menaçant, une chaleur différente des autres régions visitées, un groupe de journalistes et communicateurs à bord d’un car de plus d’une dizaine de places est dans la ville. Ne nous méprenons pas. Cette virée n’a aucun rapport avec l’achat de brochettes, dans cette ville connue pour cette particularité. Mais pour savoir quel est l’état des lieux de la fortification des Kayavillois.

La fortification est définie comme « l’action qui consiste à augmenter la teneur d’un aliment en un micronutriment essentiel (vitamines et minéraux, y compris oligo-éléments), de façon à améliorer la qualité nutritionnelle de l’alimentation et à apporter un bénéfice sur le plan de la santé publique avec un risque minimal pour la santé”, explique Docteur Abdoulaye Gueye nutritionniste en charge de la fortification et de la sécurité sanitaire des aliments à la Direction de la Nutrition (DN).

Les micronutriments, ajoute-il, sont des éléments nutritifs essentiels dont le corps a besoin en petites quantités pour fonctionner correctement. Ils comprennent les vitamines et les minéraux, qui jouent des rôles cruciaux dans divers processus physiologiques, tels que la production d’énergie, la fonction immunitaire, la coagulation sanguine, et bien d’autres.

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Alors, d’entretien en entretien, la question de la fortification passe au peigne fin. Cela, après une soirée « quartier libre » à laquelle bénéficie l’équipe. A l’arrivée, l’équipe se réveille un matin du 15 juillet 2024, sous un ciel larmoyant.

Dans ce beau climat d’après pluie, l’objectif est le même. Il s’agit bien de parler de la fortification chez les différents responsables, nonobstant les gouttes qui traversent les visages hors des bureaux. Que peut-on y faire ? Le terrain commande la manœuvre !

Cette fois, la question est plus axée sur la gestion des Enfants Déplacés Internes (EDI) plus particulièrement dans leurs assiettes issues des cantines scolaires. Un tour à la direction régionale en charge de l’éducation nous éclaire un peu sur le sujet.

Ici, il est pratiquement 12h et plus. Dans les lieux, Kissouidssida Ousmane Lallogo est le point focal des cantines scolaires. De ses dires, avec les jardins et champs scolaires, les moyens sont mis en œuvre pour servir des aliments fortifiés à cette couche vulnérable.

« Au niveau des EDI, chaque année, on recense par école. Il y a des vivres des communes fermées qu’on dépose dans les directions. Quand on finit de faire le point, on les oriente dans les écoles où il y a ces EDI. Les vivres, ces communes continuaient de les recevoir malgré que des écoles de ces localités étaient fermées », explique Ousmane Lallogo.

Le Centre-Nord du Faso totalise 79 jardins et 101 champs scolaires sur les 823 écoles fonctionnelles. A écouter les responsables des lieux, ces écoles bénéficient de cantines scolaires, alimentées par les productions des enfants.

« Nous produisons des aliments riches dans ces jardins et champs scolaires. S’il y a surproduction, ils récoltent et ils revendent dans la localité. Comme ce sont les vacances, sinon vous auriez dû le constater, ces jardins sont vraiment importants et formidables », rassure Ousmane Lallogo.

La solution des partenaires humanitaires n’est pas à négliger dans cette fortification

L’État à lui seul ne peut pas ou ne doit pas s’occuper de tout. D’ailleurs nous sommes tous l’État dit-on. C’est pourquoi, l’autre solution pour toucher ces différents EDI dans la région est la prise en compte des partenaires humanitaires qui assurent ce rôle en apport de nutriments dans les assiettes de non seulement les PDI mais aussi des EDI de la région.

« Au niveau du PAM, nous avons des micronutriments qu’on envoie en sachets et qu’on transfère dans les écoles. On les mélange dans la cuisine pour que les enfants puissent bénéficier. Il y a aussi des déparasitants qu’on remet aux enfants », foi du point focal des cantines.

La difficulté d’accès des zones ou l’épine dans les pieds du ravitaillement de certaines zones

Ce n’est pas faute d’avoir essayé ! Dans la chaîne de distribution de ces vivres, les acteurs rencontrent des difficultés selon celui-là même qui s’occupe des cantines scolaires de la région. Des difficultés naturellement en lien avec les zones d’accès. Une malheureuse réalité. « On rencontre souvent des difficultés pour ravitailler certaines zones. Si je prends par exemple le Namentenga, cette année c’est au mois de novembre qu’on a eu à faire la livraison parce que la voie était vraiment inaccessible et que les transporteurs refusent d’y aller. 

Entre temps ce sont les fils de la localité, eux-mêmes qui ont mis à disposition leurs véhicules pour que les vivres puissent parvenir. Les champs scolaires aussi ça devient très compliqué. L’espace là est devenu très compliqué », déplore-t-il.

Ousmane Lallogo point focal des cantines scolaires dans la région du centre nord

Pourtant, au plus haut niveau, notamment chez le gouverneur de la région, le Colonel-Major Zoéwendmanégo Blaise Ouédraogo, la nutrition au sein des élèves déplacés est une priorité. Un fait qu’il confirme entre autres à travers les rencontres périodiques dans la région.

« Le conseil régional de la nutrition arrive périodiquement à se réunir et les orientations nécessaires sont données afin que nous puissions faire le point des difficultés que nous avons. La région connaissant un fort taux de déplacés, il y a par exemple des difficultés pour avoir accès à la terre pour produire. Mais nous saluons tous les acteurs qui nous accompagnent au profit de la nutrition », relativise le gouverneur de la région.

Le Colonel-Major Zoéwendmanégo Blaise Ouédraogo, gouverneur de la région du centre-nord

La politique au niveau national tient compte de cette couche dans le processus de la fortification

D’ailleurs, pas que dans la région. Au niveau national, à la Direction de la Nutrition (DN), c’est un sujet qui est pris au sérieux. Docteur Abdoulaye Gueye est nutritionniste en charge de la fortification et de la sécurité sanitaire des aliments dans cette direction. Visiblement bien content de cette virée effectuée, il ne manque pas de l’afficher à travers des félicitations et remerciements. Après les salamalecs d’accueil à Ouagadougou, il parle de la situation.

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Le Dr est catégorique. Au regard de la situation sécuritaire du pays, ce sujet est abordé avec délicatesse, parlant même de la politique nationale adoptée par les plus hautes autorités. « Il faut dire qu’en matière de fortification, c’est l’apport de micro nutriments au-delà de la quantité naturelle. Il permet donc de solutionner la monotonie qui existe dans notre alimentation. Il permet de corriger cette faible diversité alimentaire. Il va de soit que les PDI et EDI qui sont dans des situations très difficiles, bénéficient de l’accompagnement des partenaires. 

Et comme dans la politique nationale, il est prévu la fortification des aliments, c’est d’encourager les décideurs à acheter ces aliments là et les disponibiliser au niveau des PDI. La stratégie prend en compte aussi bien les PDI que les enfants de moins de 5 ans et toutes ces personnes vulnérables. Il faut dire qu’ils (EDI) sont particulièrement pris en compte », réaffirme Dr Abdoulaye Gueye.

Dr Abdoulaye Gueye à la direction de la nutrition (DN)

En terme de chiffres, la malnutrition tue chaque année, environ 26.000 enfants de moins de cinq ans au Burkina Faso, selon des données de l’UNICEF en 2021. Selon la même étude, près d’un million d’enfants de moins de cinq ans souffrent de retard de croissance (petite taille par rapport à l’âge). 83,4% des enfants de 6-59 mois sont anémiés, soit plus de 2,5 millions.

Aussi, une femme sur deux en âge de procréer est anémiée et présente des carences sérieuses en micronutriments clés tels que le fer, la vitamine A, le zinc, le folate et l’iode. Ce qui constitue également la forme cachée de la malnutrition et affecte surtout les couches les plus vulnérables avec de graves conséquences au Burkina Faso… Vivement un retour définitif de la sécurité au Pays des Hommes intègres afin de voir alléger les souffrances des populations confrontées à plusieurs défis.

Abdoul Gani BARRY 

Burkina 24 

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