Sécurité alimentaire : Sylvie Kassongo, la pro de la terre à Diarradougou !

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Le Burkina Faso, à l’instar des autres pays du Sahel, fait face à une avancée du désert qui rend les sols de plus en plus arides. A côté, la situation sécuritaire du pays rend des terres inaccessibles. Le secteur agricole emploie pourtant environ 80% de la population active, selon la Banque mondiale, même si les exportations aurifères ont progressé. Dans la Région des Hauts-Bassins, une quinquagénaire retourne le sol à Diarradougou, à quelques kilomètres de Bobo-Dioulasso, dans la commune de Bama, pour gagner sa vie. Il s’agit de Sylvie Kassongo/Sama, celle-là même qui fait sien ce slogan : « La terre paye toujours lorsqu’on lui donne à manger ». Forte de son expérience acquise depuis le bas-âge avec les parents, cette amazone de 52 ans nourrit aujourd’hui plusieurs bouches. Nous sommes allés à la rencontre d’une « Lionne de la daba » au pays des Hommes intègres…  

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A perte de vue, des bouquets de plants jaillissent de terre, transformant les lieux en bocages verdoyants. C’est l’histoire d’une dame au cœur vaillant. Sylvie Kassongo/Sama, une Burkinabè de 52 ans. Elle est un exemple dans sa communauté.

Née dans les contrées de la lagune Ebrié en territoire ivoirien, elle est issue d’une famille d’agriculteurs. Façonnée par le plus grand exemple dans leur vie, c’est-à-dire son géniteur, cette amazone s’est vue influencer par les pratiques de celui-ci. Elle décide d’en faire autant. Pouvoir coûte que coûte retourner la terre pour subvenir à ses besoins. Donc, être celle-là qui va défier tous ces préjugés sur la gent féminine : « la place de la femme, c’est à la cuisine »…

« Je suis née en Côte d’Ivoire, fille d’un grand producteur. Le papa nous a formés sur l’agriculture. Il nous a toujours appris deux voies ; celle du bic et celle de la daba. Après mon mariage, je suis rentrée au Burkina Faso. Mon mari m’a proposé d’autres travaux. On voit qu’aujourd’hui les gens négligent l’agriculture.

Je voulais faire savoir aux femmes qui doutent qu’en matière de terre, seul le travail paye. On ne compte pas sur ton niveau d’études, tu as le BAC, tu as le BEPC, non, on regarde seulement le rythme de ton travail », interpelle déjà la quinquagénaire pour commencer.

Sylvie Kassongo produit des bananes plantains au Burkina Faso

Décidée, elle concrétise son désire en s’octroyant une ferme pour exploitation. Sylvie Kassongo prend pour résolution de produire pour nourrir son rêve, soutenir la sécurité alimentaire au Burkina Faso mais aussi répondre aux détracteurs qui pensent que la terre est faite seulement pour les hommes.

Elle crée donc la Ferme Benewende de la famille Kassongo, à quelques kilomètres de Bobo-Dioulasso soit précisément dans la commune de Bama. « Ce site est composé de plusieurs cultures. C’est depuis 2003 que nous sommes sur le site. Moi j’avais créé cette ferme pour motiver les jeunes et surtout les femmes », indique-t-elle.

  « Faire aimer l’agriculture à la jeunesse »

Un chef-d’œuvre familial de 10 hectares dont 6 clôturés, « Ferme Famille Kassongo » qui donne vie aux plantes. Avec plusieurs variétés notamment des bananiers, des papayers, des manguiers, des pépinières, du palmier à huile, du blé, Sylvie Kassongo s’adonne corps et âme entre quatre murs pour prouver le contraire aux préjugés. Elle produit dans cette superficie des variétés consommées par des Burkinabè et s’atèle à faire comprendre à la jeunesse que le pays a besoin d’engagement dans ce milieu. Et que personne n’est d’office destiné à travailler dans un bureau.

« Depuis 2023 à nos jours, nous avons eu des jeunes ici. On reçoit souvent des élèves. Je rappelle que j’ai créé cette ferme pour motiver les jeunes et les femmes. Il y a souvent des élèves à leur temps libre qui viennent m’aider dans les travaux. On peut dire qu’il y a plus de 200 jeunes qui sont passés par là. Ils n’avaient pas l’amour de la terre mais le fait qu’ils sont passés par là, je peux vous dire que d’autres ont cultivé cet amour pour la terre. C’est ce dont on a besoin, faire aimer l’agriculture à la jeunesse », affirme l’amazone.

Sylvie Kassongo une championne de la terre au Burkina Faso

Avec toutes ces productions, la ferme ravitaille les différents marchés de Bobo-Dioulasso, de la région, du Burkina. Il y a également des exportations vers d’autres pays sous régionaux. C’est même un grenier fait maison pour la population environnante. Le pasteur Touwendinda Nikiéma, à quelques kilomètres de la zone, reconnaît l’importance de cette amazone pour le village mais également pour le pays.

 « Elle n’a pas froid aux yeux, lorsqu’elle est au milieu des hommes »

« En tout cas cette dame nourrit beaucoup. Déjà quand on regarde les ouvriers qui sont passés ici on peut l’applaudir. Même son manioc, souvent ce sont des camions qui viennent se ravitailler. A Diarradougou ici, elle est d’un très grand apport. Elle m’a même confié qu’elle à des semences qu’elle va distribuer dans le Burkina Faso. Vraiment on aime voir ce qu’elle fait pour la jeunesse ici », confesse le pasteur Touwendinda Nikiéma.

D’ailleurs, il est direct concernant cette amazone : « Sylvie est un exemple à enseigner au regard de son dévouement au travail ». « C’est une femme qui se bat, elle n’a pas froid aux yeux, lorsqu’elle est au milieu des hommes. Quand elle vient pour un travail, tant que ce travail n’est pas fini, elle ne se repose pas. Je suis même obligé souvent de lui dire d’arrêter pour manger quelque chose. Même les ouvriers peuvent témoigner cela », foi du pasteur.

A Bientôt 20 ans de travail, Sylvie prouve aux Burkinabè que les productions des pays côtiers sont possibles aux pays des Hommes intègres. Dans sa superficie propre à elle, du blé, des bananes plantains et des palmiers à huile sont également mis sous terre. Le blé qui est en phase d’essai rassure la reine du sol de Diarradougou.

« Je vais prendre exemple sur la banane plantain. Souvent on demandait des pieds de banane et on nous disait que ce n’est pas disponible parce que ça ne réussit pas ici. Il y a un agent de l’INERA qui est venu me proposer sa production depuis 2014. Et on l’a réussie. Quand on a essayé les 3 trois variétés, en tout cas il n’y a rien de tel. On m’a donné 80 pieds et j’ai multiplié cela. On a même fait un meilleur rendement que pour des productions de la Côte d’Ivoire », affirme Sylvie Kassongo.

  Sylvie Kassongo emploie aussi des déplacés internes

Loin de toute cette ambition de remuer la terre, cette quinquagénaire veut également impacter à travers sa touche dans la construction d’un Burkina autonome. C’est pourquoi, déjà, elle s’active à prôner cette résilience du Burkina en offrant ses services aux Personnes déplacées internes de la zone.

En effet dans ses périodes de dur travail, Sylvie a recours à la main d’œuvre des déplacés internes, majoritairement des femmes et des jeunes enfants, résidant dans la zone. Ils sont plus d’une vingtaine qui viennent aider à labourer et faire bien d’autres activités. Par cette action, la « pro de la terre à Diarradougou » veut montrer aux yeux du monde que chacun, sans exception, peut apporter sa touche dans cette résilience au pays des Hommes intègres.

« Comme j’ai un champ, je demande souvent l’aide des jeunes. C’est là j’ai contacté le pasteur qui m’a fait savoir qu’il a des déplacés, mais qu’actuellement c’est vraiment difficile. Donc on a loué des maisons pour eux. J’ai trouvé un hectare, j’ai cherché des semences et des motopompes, pour eux.

Avec ça ils se débrouillent et travaillent avec les autres. Lorsque j’ai un travail ils sont là et je les paye. Pendant l’hivernage, ils sont là, ils travaillent aussi leurs terres. Moi j’en avait au total 7, mais avec l’apport de ceux du pasteur actuellement, ils sont au nombre de 22. Mais avec ce que l’État est en train de faire, il y a 7 qui ont rejoint leurs localités », détaille Sylvie Kassongo.

Sylvie est aussi une des figures respectées de la zone. Elle est un exemple pour certains jeunes dont Aly Ouattara qui est d’ailleurs son filleul. Ce jeune trentenaire est clair dans ses propos : Sylvie est presque une mère, tenant compte de ses exploits en tant que femme.

Ce n’est pas étonnant lorsque Aly demande à ce que beaucoup de femmes de ce pays aient ce sens de créativité et de la prise de conscience de leurs capacités à changer ce monde. Sa marraine est, selon lui, une source de lumière dans ses prises de décisions et le modèle de sa ferme doit impérativement être multiplié au Faso.

« Sa ferme est une ferme modèle au Burkina Faso. Il faut trouver beaucoup de ce genre au Burkina Faso. Moi je la vois comme une femme très exemplaire, une femme auprès de laquelle beaucoup doivent venir apprendre. Elle fait partie des 5 meilleurs producteurs de banane au Burkina Faso. On sait très bien que l’entreprenariat n’est pas chose facile et c’est soit, on gagne, soit on perd. Donc c’est une femme qui a osé, on ne savait même pas que les bananes plantins et les bananes douces pouvaient marcher au Burkina Faso. Mais elle s’est lancée et voilà le résultat », soutient Aly Ouattara.

Toutefois, comme bien d’autres agriculteurs du Burkina Faso, la native de Côte d’Ivoire rencontre des difficultés liées à l’exploitation de ses terres. Le climat et la disponibilité des terres sont ces quelques cauchemars dans la ferme Benewende. Le plus grand souci de Sylvie se trouve au niveau des préjugés sociaux. « Je suis fille d’un grand producteur à partir de la Côte d’Ivoire.

Aly Ouattara, un grand admirateur de Sylvie Kassongo

Donc moi aussi, je voulais essayer la banane. Au commencement, ça n’a pas été facile parce que les gens disaient que ce n’était pas un travail de femme. Que même les hommes échouent dans ce travail à plus forte raison les femmes. Aujourd’hui, je suis vraiment fière de ce que nous arrivons à faire », se réjouit Sylvie Kassongo.

La disponibilité des terres cultivables, et la parcimonie des terres sont les autres épines de dame Sylvie au Burkina Faso. Cette avarice de la terre a pour conséquence la cherté de ces matières premières. « Ici au Burkina Faso, contrairement à ceux qui cultivent la banane plantain en Côte d’Ivoire, nous sommes obligés de nourrir la terre à cause de certains manques.

Donc à la récolte, elle nous coûte un peu plus chère que les bananes venant de la Côte d’Ivoire. Mais la qualité est vraiment là ça je peux vous l’assurer. Et le blé, nous pouvons le produire ici aussi. Nous avons déjà les semences ici et nous allons nous y mettre », rassure Sylvie Kassongo.

Néanmoins, cette ferme de la famille Kassongo veut s’illustrer aussi dans l’accompagnement de la vision du gouvernement : faire de la production d’autres cieux, une réalité ici. Outre les autres variétés citées (le blé, la banane plantain), elle concrétise ce vœu en conditionnant des semences de graines de palmier pour en redistribuer sur le territoire national. Sur ce point, Sylvie rassure, « nous sommes déjà prêts et ce sont les terres qui nous manquent. Je dis au gouvernement que même si c’est 100 hectares que nous avons eus, nous pourrions l’exploiter avec ces graines de l’huile de palme ».

La terre nourrit son homme à la ferme Benewende ! Cet espace de 10 hectares a même valu un prix à l’international à l’amazone. Un prix qu’elle a remporté au Canada pendant qu’elle était en compétition avec une dizaine de pays. La relève est en plus assurée dans cette famille. En effet, le couple Kassongo est parent de trois enfants, tous tournés dans des métiers en lien avec l’agronomie.

La fille de la famille, Bernadette Kassongo, a fait des études en industrie agroalimentaire. Son rêve est de pouvoir transformer les produits de cette ferme après production. L’autre, Abel Kassongo a fait des études en génie plomberie et compte tout faire pour arroser cette ferme par l’installation des forages et des pompes dans l’avenir.

Le troisième, Othniel Kassongo, lui, se donne pour objectif d’exporter, de commercialiser les productions de cette ferme. Laquelle ferme qui se produit également en élevage. Elle est fonctionnelle pendant les deux saisons humide et sèche. Elle produit également des fruits pour transformation…

Abdoul Gani BARRY 

Burkina 24 

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