Sahel : « Tout le monde veut y être »

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A la soirée du 10 décembre 2018 à l’espace Gambidi, la 14e édition du festival Ciné Droit Libre a consacré un plateau spécial à  la situation sécuritaire qui sévit dans la région du Sahel.

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La situation sécuritaire fait couler beaucoup d’encre et de salive. Les causes de ce fléau, les solutions et des témoignages ont marqué la soirée du 10 décembre 2018 au Festival Ciné Droit Libre. Parmi les panélistes,  Dr Rasablaga Seydou Ouédraogo, Coordonnateur de l’Institut Free Afrik et Prétus Barry, directrice régionale de Amnesty International.

Le droit des terroristes ! Pretus Barry en parle. Difficile pour le public d’accepter reconnaître un droit à des individus qui viennent dans le seul but d’endeuiller la population. Mais la directrice régionale de Amnesty international souligne qu’au nom de la guerre contre du terrorisme, il est important de ne pas semer une autre terreur. « Ne pas torturer (Ndlr les terroristes). Ils ont droit à des procès équitables. De ne pas laisser les terroristes 10, 15 ans en prison sans avoir accès à un juge. Les enfermer avec des traitements inhumains dégradants. Cela n’est pas acceptable… ».

Malgré les raisons avancées par dame Pretus, le public n’en démord pas. Selon une étudiante, il n’est pas possible de donner des droits à des terroristes alors qu’ils n’en observent pas à l’endroit des soldats burkinabè qui sont tués dans les zones attaquées, dont le Sahel.

Le Sahel et ses enjeux 

Pour comprendre la situation dans cette région, justement, Dr Rasablga Ouédraogo a donné des pistes d’explication. « Si nous voulons comprendre ce qui arrive au Sahel, dit-il, il faut qu’on parte au-delà de la région du Sahel, la sous-région du Sahel. C’est un enjeu géostratégique depuis des millénaires. L’enjeu, c’est d’abord le contrôle des frontières européennes. Si vous voulez contrôler l’Europe et les frontières européennes pour que la misère venue d’Afrique et du sud, la drogue venue d’Amérique Latine n’atteignent pas l’Europe, vous devez contrôler le Sahel ».

Le deuxième enjeu, toujours selon Rasablga Ouédraogo, est que le Sahel regorge de  ressources telles que l’uranium, l’or, le pétrole, l’eau douce. Pour être une puissance mondiale, aujourd’hui, il ne faut pas se priver d’être dans le Sahel, tire-t-il. « Tout le monde veut y être, parce que les rentes de criminalité extraordinaires qu’il y a dans le Sahel sont importantes. L’une des voies importantes de trafic de drogue dans le monde pour irradier en Europe,  c’est dans le Sahel. Il y a des trafics de migrants, etc. », ajoute-t-il.

En sus de ces raisons, il  y a celles endogènes au terrorisme. « Les programmes d’ajustement structurels ont bloqué la construction de nos Etats post coloniaux et l’Etat s’est fabriqué de façon inégale. Les nord Mali, Burkina, Niger  ont été des parents pauvres des infrastructures publiques. Nos politiques ont fabriqué des  inégalités incroyables qui expliquent que des populations de ces régions se sentent délaissées pendant qu’il y a des ressources sous leurs sols », déplore Rasablga Ouédraogo.

« Si on dérivait juste le tiers du budget  pour s’occuper des questions des gens,  on aurait vaincu à 60% le terrorisme » 

Mais quelles solutions sont actuellement proposées ? Le chercheur est plutôt amer. « La crise actuelle du Sahel a deux noms, dit-il.  Il y a une absence d’ambition collective et un vide de souveraineté politique. Regardez les partis politiques. Quel est leur agenda pour la sécurité ? Où sont nos acteurs avec leurs propres agendas, leurs propres moyens ? Ce vide de souveraineté, c’est un appel à la constitution d’acteurs stratégiques africains dans une souveraineté qui puisse respecter la démocratie des possibles dans le monde ».

« C’est presque toute la région du Sahel qui est touchée. A part Djibo centre, presque toutes les écoles sont fermées. Nous y sommes par patriotisme parce qu’à tout moment, tout peut arriver. Il ne faut pas compter sur les forces de l’ordre parce qu’elles même se cherchent. On peut te faire tout ce qu’on veut. Ce qui fait que souvent, on est obligé de ne pas tenir certains propos ».

Un enseignant au lycée départemental de Golgadji depuis 2012

Newton Ahmed Barry, président de la Commission électorale nationale indépendante (CENI), présent au débat, a donné son point de vue sur les solutions qui pourraient être envisagées.

 « Je suis convaincu que si les énormes budgets que l’on engloutit aujourd’hui dans la question sécuritaire, si on dérivait juste le tiers pour s’occuper des questions des gens, on aurait vaincu à 60% le terrorisme. C’est ma conviction », a-t-il commenté. Citant un officier français, il expose que «dans le Sahel et dans la lutte contre le terrorisme,  ce n’est pas la guerre qu’il faut gagner. Ce sont les populations qu’il faut gagner. (…) Hélas nous l’avons pas encore gagné« .

Irmine KINDA

Burkina 24

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